À la double question posée, la réponse concernant l’indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif ne laissait, il y a peu d’années encore, qu’une maigre place au débat.
Elle était donnée et confirmée par quelques déclarations de garde des Sceaux d’alors. Ainsi Pascal Clément qui affirmait en 2006 : « les procureurs doivent obéir au pouvoir exécutif ». Ainsi Rachida Dati qui clamait en 2007 être la Chef des procureurs. Ainsi encore Michèle Alliot-Marie qui déclarait « il y a une cohérence entre le mode de nomination des procureurs et le fait qu’ils peuvent recevoir des instructions générales et des instructions dans les dossiers particuliers ».
Cette réponse était surtout confortée par la Cour européenne des droits de l’Homme
( CEDH ) de Strasbourg qui constatait dans un arrêt du 29 mars 2010 ( Medvedev c/
France ), suivi de deux autres dans le même sens en 2010 ( Moulin c/ France- 23/11/2010 ) et en 2013 ( Vassis c/France-27/06/2013 ), que « le procureur de la République n’est pas une autorité judiciaire au sens que la jurisprudence de la Cour donne à cette notion. Il lui manque en particulier l’indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif pour être ainsi
qualifié ».
La réponse sur l’impartialité n’était guère plus discutée.
La doctrine et les jurisprudences nationale et européenne s’accordaient à soutenir l’absence d’impartialité au motif que le ministère public était l’accusation et la partie poursuivante.
L’exigence d’impartialité ne vise pas le représentant de l’accusation jugeait la chambre criminelle de la Cour de cassation le 6 janvier 1998 qui confirmait le 15 décembre 2010 que le magistrat du ministère public n’était pas une autorité judiciaire au sens de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dès lors qu’il ne présente pas les garanties d’indépendance et d’impartialité requises par ce texte et qu’il est partie poursuivante.
Hier encore des hommes politiques de premier plan n’hésitaient pas, en moyens de défense dans des affaires judiciaires, à mettre en cause l’indépendance et l’impartialité du ministère public . Tel fut le cas de l’entourage de François Fillon dénonçant, dans la procédure le concernant, un coup d’État institutionnel, venu de la gauche, piloté de l’Élysée par un « cabinet noir », ou encore de Jean-Luc Mélenchon qui déclarait à propos de sa convocation par le parquet de Bobigny à la suite des incidents survenus lors de la perquisition à son domicile et dans les locaux du parti La France insoumise : « tout ça n’a rien à voir avec la justice. C’est un abus de pouvoir qui fait partie des mesures autoritaires d’un régime qui est lui-même autoritaire et a décidé de me pourrir la vie en me convoquant à intervalles réguliers sous un prétexte ou un autre ».
Alors, au fil des évolutions législatives, des pratiques judiciaires, des engagements du Président de la République et du gouvernement et à l’orée d’une réforme
constitutionnelle, quelles réponses peut-on donner aujourd’hui à cette interrogation : le ministère public français est-il indépendant et impartial ?
Le plan favori des juristes en deux parties est ici naturellement dicté par la dualité de la question.
Mais avant de tenter d’y répondre, il n’est pas inutile de rappeler en quelques mots les grands traits du ministère public français :
Les magistrats du ministère public, autrement appelés du parquet, et les magistrats du siège constituent un corps judiciaire unique aux termes de l’article 1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant statut de la magistrature.
le fonctionnement des parquets est régi par les principes de subordination hiérarchique ( le procureur général est le chef hiérarchique des magistrats du ministère public d’une Cour d’appel, le procureur de la République est le chef hiérarchique au sein de son parquet ) et d’indivisibilité ( chaque membre d’un parquet le représente entièrement et chaque acte que ce membre accomplit engage le parquet).
les missions du ministère public que sont la protection des intérêts de la Société, de l’ordre public et des libertés individuelles conditionnent pour l’essentiel les libertés des citoyens : la direction des enquêtes et le contrôle et la direction de la police judiciaire, la surveillance des placements en garde à vue et de leur déroulement, les décisions de poursuite ou de classement sans suite, la protection de l’enfance en danger, la protection des incapables majeurs, la préservation des emplois dans le cadre des entreprises en difficulté, la prévention de la délinquance, la défense de l’intérêt général devant les juridictions civiles…
Le ministère public français est–il indépendant ?
L’indépendance n’est pas un privilège accordé au magistrat. Elle assure la prééminence du droit en faveur de ceux qui demandent justice. Elle est le garant de la confiance du justiciable dans sa justice. Elle est une condition inhérente à l’État de droit, élément essentiel de notre démocratie avec la souveraineté de la Nation et celle du peuple , qui ne peut exister sans un équilibre entre les trois pouvoirs qui doivent être séparés, comme Montesquieu l’a théorisé. Elle est une garantie fondamentale du procès équitable au sens de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui fait partie du bloc de constitutionnalité.
Notre Constitution en pose le principe en son article 64 : « le Président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire. Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature. Une loi organique porte statut des magistrats. Les magistrats du siège sont inamovibles ».
Si les magistrats du ministère public font partie du corps judiciaire, le constat peut être fait aujourd’hui de leur indépendance dans le traitement des affaires individuelles mais de leur dépendance persistante au pouvoir exécutif pour leur carrière et leur régime disciplinaire.
Le Président de la République a clairement dit ce qu’il estime être les fondements de ce lien entre le pouvoir exécutif et le ministère public à l’occasion de son discours devant la Cour de cassation le 15 janvier 2018 en ces termes : « Il est normal qu’un gouvernement qui porte une politique pénale puisse la défendre, l’expliquer, en répondre, qu’elle puisse être débattue et le parquet doit donc continuer à mes yeux à appartenir à une chaîne hiérarchique dont le sommet est une autorité qui porte cette responsabilité politique, l’assume car c’est l’exécutif qui est dépositaire du mandat du peuple ».
– L’indépendance dans le traitement des affaires individuelles
Les principes et les dispositions légales en vigueur permettent d’affirmer cette indépendance.
° le principe de l’opportunité des poursuites
Ce principe que le Conseil constitutionnel a élevé au rang constitutionnel en 2016 résulte des articles 40 et 40-1 du code de procédure pénale aux termes desquels le procureur de la République, lorsqu’il estime que les faits portés à sa connaissance constituent une infraction commise par une personne susceptible d’être poursuivie, est libre, soit d’engager les poursuites, soit de mettre en œuvre une procédure alternative aux poursuites, soit de classer sans suite la procédure dès lors que les circonstances particulières liées à la commission des faits le justifient.
Certes, cette dernière décision n’est pas sans recours pour le plaignant mais ce recours est fait auprès d’un autre magistrat, le procureur général qui pourra, soit confirmer la décision, soit ordonner au procureur d’engager les poursuites.
° le principe de la liberté de parole
La liberté de parole du magistrat du ministère public est protégée par un principe déjà en vigueur sous l’Ancien Régime et dont bénéficiaient les gens du Roi , les parquetiers d’avant la Révolution : « la plume est serve mais la parole est libre ».
Ce principe est repris par l’article 5 de l’ordonnance statutaire du 22 décembre 1958 : « À l’audience leur ( les magistrats du parquet ) parole est libre ». Cette liberté permet au magistrat, quelque soit son grade et même placé sous l’autorité de son chef hiérarchique, de s’exprimer à l’audience et de prendre ses réquisitions orales selon sa conscience et sa seule conscience.
Ce principe doit néanmoins se conjuguer avec celui de loyauté qui veut que le magistrat, si il sait avant l’audience que sa position sur une affaire est différente de celle de son procureur, il lui en fasse part afin que celui-ci puisse en toute connaissance de cause prendre la décision, soit de laisser le magistrat représenter le ministère public à l’audience et, dès lors, le laisser libre de ses paroles , soit de le remplacer.
° l’interdiction des instructions ministérielles dans les affaires individuelles
La loi du 25 juillet 2013 a modifié l’article 30 du code de procédure pénale qui dispose désormais : « le ministre de la justice conduit la politique pénale déterminée par le gouvernement. Il veille à la cohérence de son application sur le territoire de la République. À cette fin il adresse aux magistrats du ministère public des instructions générales. Il ne peut leur adresser aucune instruction dans les affaires individuelles ».
La fin des instructions individuelles, écrites comme orales, ajoutée aux principes de l’opportunité des poursuites et de la liberté de parole, permet d’affirmer l’indépendance pleine et entière du ministère public dans le traitement des procédures dont il est saisi.
Il convient toutefois de relever que tout lien n’a pas été coupé avec le gouvernement puisque la loi précitée, tout en supprimant les instructions ministérielles dans les affaires individuelles, a donné une base légale à la communication au ministre d’informations sur le contenu de ces affaires.
Si le ministère public français apparaît aujourd’hui indépendant et libre de ses décisions pour le traitement des affaires individuelles, il n’en est pas de même pour le déroulement de la carrière de ses membres et pour son régime disciplinaire, domaines dans lesquels il demeure sous l’autorité du garde des Sceaux.
– La dépendance dans le déroulement de la carrière et le régime disciplinaire
Aux termes de l’article 5 de l’ordonnance statutaire les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du garde des Sceaux, ministre de la justice.
Hormis les instructions générales de politique pénale que peut donner le garde des Sceaux, cette autorité se concrétise dans le déroulement de la carrière et le régime disciplinaire des magistrats du ministère public.
° le mode de nomination des magistrats du ministère public
La matière est principalement régie par les articles 65 de la Constitution et 28 de l’ordonnance statutaire.
Les magistrats du ministère public sont nommés par décret du Président de la République sur proposition du garde des Sceaux, ministre de la justice après avis simple de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature ( CSM ). Cette commission est présidée par le procureur général près la Cour de cassation et composée de 5 magistrats du parquet élus par leurs pairs, 1 magistrat du siège élu par ses pairs, 1 conseiller d’État, 1 avocat et 6 personnalités extérieures désignées par le Président de la République, le Président de l’Assemblée nationale et le Président du Sénat, chacun pour deux d’entre elles.
Ainsi, la carrière des magistrats du ministère public dépend du pouvoir exécutif qui dispose du pouvoir de proposition des nominations et qui n’est pas lié par l’avis du CSM, même si depuis 2012, les gardes des Sceaux successifs se sont engagés à suivre ces avis.
À cet égard, il convient de rappeler qu’à l’automne dernier le Président de la République a fait l’objet de critiques pour être intervenu dans le choix du nouveau procureur de la République de Paris. Alors que la ministre de la justice avait sélectionné trois candidats, le chef de l’État a choisi un autre candidat, lequel a été nommé pour exercer ces fonctions.
Il faut ajouter que le ministère public ne bénéficie pas de la garantie de l’inamovibilité réservée par la Constitution aux magistrats du siège. C’est ainsi qu’aucune disposition, ni aucun principe général du droit n’interdisent au Président de la République de muter d’office dans l’interêt du service ces magistrats.
L’absence de cette garantie est considérée par la Cour européenne des droits de l’homme ( CEDH) comme un élément de l’absence d’indépendance du ministère public à l’égard de l’exécutif ( arrêt précité CEDH 23/11/2010 Moulin c/ France )
° la procédure disciplinaire
Il est suffisant de souligner que la décision en matière de discipline des magistrats du ministère public appartient au garde des Sceaux après avis simple du CSM, là encore à la différence des magistrats du siège qui ne peuvent être sanctionnés disciplinairement que par une décision de ce CSM.
Indépendance pour le traitement des affaires individuelles, dépendance pour la carrière et la discipline, une forme de synthèse sera faite par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 8 décembre 2017.
Le Conseil avait été saisi par le Conseil d’État d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 5 précité de l’ordonnance statutaire qui place les magistrats du parquet sous l’autorité du garde des Sceaux, ministre de la justice.
L’Union syndicale des magistrats (USM) rejointe par d’autres intervenants dont le Syndicat de la magistrature (SM) reprochait à ces dispositions, d’une part de méconnaître le principe d’indépendance de l’autorité judiciaire qui découle de l’article 64 de la Constitution et d’autre part de méconnaître le principe de séparation des pouvoirs.
Dans sa décision, le Conseil juge que si la Constitution consacre l’indépendance des magistrats du parquet dont découle le libre exercice de leur action devant les juridictions, cette indépendance doit être conciliée avec les prérogatives du gouvernement et qu’elle n’est pas assurée par les mêmes garanties que celles applicables aux magistrats du siège. Il juge ainsi que les dispositions contestées assurent une conciliation équilibrée entre le principe de l’indépendance de l’autorité judiciaire, dont fait partie le ministère public, et les prérogatives que le gouvernement tient de l’article 20 de la Constitution (« Le gouvernement détermine et conduit la politique la Nation »). Le Conseil juge également que ces dispositions ne méconnaissent pas non plus la séparation des pouvoirs.
Cette décision qui exclut le raisonnement binaire, indépendant – non
indépendant ,consacre le principe que l’indépendance des magistrats du ministère public n’a pas le même degré de garanties que celui des magistrats du siège, alors que pour beaucoup, à commencer par la CEDH, ces garanties sont insuffisantes et ont pour conséquence que les magistrats du ministère public ne sont pas suffisamment indépendants au regard des critères de la Cour.
Le Président de la République lui-même le reconnaîtra dans son discours précité devant la Cour de cassation en déclarant : « Je crois donc profondément que le parquet à la française se doit d’être rattaché par ses fonctions mêmes au garde des Sceaux mais notre travail est d’assurer plus fermement, plus clairement son indépendance… Comment assurer dans l’équilibre démocratique que je viens de rappeler, l’indépendance pleine et entière des magistrats et en particulier des magistrats du parquet ? En étant d’une rigueur absolue sur les critères de nomination et de promotion et en étant d’une rigueur équivalente sur le sujet des affaires individuelles… Sur les affaires particulières aucune instruction individuelle ne doit être donnée. La loi de 2013 l’a dit très clairement : c’est un principe qui sera maintenu.
Pour ce qui est de la nomination, je souhaite en effet que mous puissions apporter des garanties supplémentaires. Les magistrats du parquet seront donc nommes après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature et bénéficieront en matière disciplinaire de la même garantie que leurs collègues juges… ».
Le Président de la République s’est engagé à ce que la réforme constitutionnelle à venir prévoit ces modifications.
Le dernier pas, celui du transfert au CSM du pouvoir de proposition des nominations, demeurera à faire.
Si il est donc possible d’affirmer aujourd’hui que le ministère public français n’est pas suffisamment indépendant, est-il pour autant impartial ?
Le ministère public français est-il impartial ?
L’impartialité est symbolisée par les yeux bandés de Thémis pour se garder de toute influence extérieure comme intérieure.
Elle se définit par l’absence de préjugés ou de parti pris et concerne tant la décision de justice que le processus qui a conduit à cette décision.
Comme l’indépendance, elle est un droit garanti au justiciable par l’art 6-1 de la
convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elle constitue pour le magistrat plus qu’un devoir, une obligation qui rend effectif l’un des principes fondateurs de la République : l’égalité des citoyens devant la loi.
Si les procédures de récusation et de renvoi pour cause de suspicion légitime ne concernent que les magistrats du siège, la nécessaire impartialité dans le traitement des affaires s’impose également aux magistrats du ministère public.
Ainsi que le soulignent Frédéric Desportes et Laurence Cousquer-Lazerges dans leur traité de procédure pénale : « un magistrat partial n’est pas un magistrat acceptable »,qu’il soit du siège ou du parquet.
L’impartialité est aujourd’hui pour le magistrat du ministère public français une obligation déontologique et une obligation légale .
– L’impartialité, une obligation déontologique
Pour la jurisprudence de la CEDH, l’impartialité doit s’apprécier selon une démarche subjective qui concerne les convictions personnelles, le for intérieur du magistrat, et une démarche objective, l’apparence d’impartialité qui s’apprécie du point de vue d’un observateur extérieur.
« Il faut non seulement que justice soit faite, mais aussi qu’elle le soit au vu et au su de tous » dit un adage anglais ( « Justice must not only be done, it must also be seen to be done »).
Ainsi, à titre d’exemple, un magistrat du ministère public devra naturellement demander à être remplacé pour le traitement d’ une procédure concernant un membre de sa famille, un proche, une relation de travail ou d’amitié.
Le recueil des obligations déontologiques des magistrats rédigé par le CSM constitue un guide pour tous les magistrats et l’impartialité figure naturellement au premier rang de ces obligations. quelques passages concernant l’impartialité du ministère public méritent d’être cités : « dans l’exercice de son activité professionnelle, le magistrat fait abstraction de tout préjugé et adopte une attitude empreinte d’objectivité »
«Dans leurs activités judiciaires, notamment aux abords des salles d’audience, les juges et procureurs doivent être soucieux de l’image d’impartialité qu’ils offrent et ne pas apparaître, aux yeux des personnes non averties, dans une relation de trop grande proximité et moins encore, de complicité. La même prudence doit être observée à l’égard des conseils des parties en cause et de l’ensemble des acteurs du procès »
« Le président d’audience, comme le représentant du ministère public s’exprime à l’égard de tous les acteurs du procès, avec la même objectivité »
« La mobilité fonctionnelle et géographique, contribue à l’exercice impartial de la fonction de magistrat ».
– L’impartialité, une obligation légale
Si pour la CEDH et la doctrine on ne peut attendre de la partie poursuivante qu’elle soit impartiale deux dispositions légales qui s’imposent au ministère public viennent contredire cette position.
L’article 31 du code de procédure pénale modifié par la loi du 25 juillet 2013 pose le principe général en ces termes : « le ministère public exerce l’action publique et requiert l’application de la loi, dans le respect du principe d’impartialité auquel il est tenu »
L’article 39 du même code créé par la loi du 3 juin 2016 précise en outre concernant la phase d’enquête : « Dans le cadre de ses attributions de direction de la police judiciaire, le procureur de la République peut adresser des instructions générales ou particulières aux
enquêteurs. Il contrôle la légalité des moyens mis en œuvre par ces derniers, la proportionnalité des actes d’investigation au regard de la nature et de la gravité des faits, l’orientation donnée à l’enquête ainsi que la qualité de celle-ci.
Il veille à ce que les investigations tendent à la manifestation de la vérité et qu’elles soient accomplies à charge et à décharge, dans le respect des droits de la victime, du plaignant et de la personne suspectée »
En conséquence, il faut considérer que l’annulation de la procédure doit être envisagée chaque fois que la recherche de la vérité a pu être viciée par le comportement partial de l’autorité de poursuite.
Rappelons également qu’à l’audience, il appartient au magistrat du ministère public de requérir l’abandon des poursuites si il estime, à l’issue des débats, qu’un doute est apparu sur la culpabilité d’un prévenu.
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Le ministère public français n’est pas suffisamment indépendant et même si la réforme constitutionnelle annoncée est adoptée, il ne le sera toujours pas complètement tant que le pouvoir exécutif conservera le choix, notamment, des procureurs généraux et des procureurs de la République.
Le ministère public français se doit d’être impartial. Il en a le devoir et l’obligation. L’est-il ? Il est possible de dire qu’aujourd’hui plus qu’hier, il l’est devenu.
Demeure ce que sont les hommes et les femmes qui le composent, avec leur force de caractère, leur faiblesse, leur résistance ou leur fragilité face à la fascination du pouvoir, la tentation de la carrière et des honneurs, leur refus ou leur laisser-aller face au piège de la culture de soumission.
La conclusion appartient alors naturellement à Montesquieu dans son discours devant le Parlement de Bordeaux le 12 novembre 1725 :
« Procureurs…que n’ennoblissez-vous votre profession par la vertu qui les orne toutes ? Que nous serions charmés de vous voir travailler à devenir plus juste que nous ne le sommes ! Avec quel plaisir vous pardonnerions-nous cette émulation ! Et combien nos dignités nous paraîtraient-elles viles auprès d’une vertu qui vous serait chère !… Procureurs, vos devoirs touchent de si près les nôtres, que nous, qui sommes préposés pour vous reprendre, nous vous conjurons de les observer. »
Montesquieu voulait déjà que les procureurs soient autant juges que les juges.